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Libération

Luiz Ruffato, riz amer

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«Remords», le retour dans sa ville natale d’un Brésilien au bout du rouleau.
Luiz Ruffato. (Daniel Mordzinski.)
publié le 8 mai 2021 à 15h31

«Les lieux, les arbres, les maisons sont les mêmes que dans mon enfance – mais pas les visages, pas les voitures, pas les motos. Je suis un fantôme effrayé qui bute contre des corps en mouvement effréné dans les territoires du passé.» Oséias, un homme d’une cinquantaine d’années, est de retour après vingt ans d’absence. Personne ne l’attend à Cataguases, ville moyenne du Brésil dans la région du Minas Gerais qui a vu naître l’auteur : il n’a pas prévenu sa fratrie. La chaleur est accablante, il transpire sous sa casquette, et ne paie pas de mine avec son sac à dos gonflé d’une poignée de vêtements. «Pourquoi tu as décidé de débarquer comme ça, sorti de nulle part, Oséias ?» l’interroge durement sa sœur Rosana, qui lui ouvre la chambre d’ami de mauvaise grâce. Il voulait «un peu de paix», dit-il, esquivant, à cette femme qui «a réussi», obsédée par son apparence.

Pendant six jours, les moindres faits et gestes de l’ancien représentant de commerce en engrais et semences vont être racontés à la première personne du singulier. L’homme prend une chambre d’hôtel, va voir dans une banlieue pauvre son autre sœur, la vaillante Isinha, tente de rencontrer le maire, ex-camarade d’école. Il mange des pâtes avec sa première amoureuse, Marilda, et ses ridicules chiens jappant. Part à Rodeiro, dans la campagne : son frère João Lúcio a repris les terres des oncles italiens sur lesquelles il vit richement. Qu’est donc venu faire ici Oséias ? On ne le saura qu’à la fin, ma