Loin du paradis d’autrefois, l’île de Silicium s’est muée en décharge de déchets électroniques. Les pays occidentaux y acheminent leurs équipements défectueux, et des milliers de «déchetiers» triment en triant les composants, sélectionnant les métaux précieux. «Tout était enveloppé dans un miasme de plomb, dont une partie provenait de la brume blanche générée par l’eau régale chauffée dans les bains d’acide, ainsi que de la suie noire produite par la combustion incessante de PVC, d’isolants et de circuits imprimés dans les champs et le long des berges de la rivière. Les deux couleurs étaient mélangées par la brise marine jusqu’à ce qu’on ne puisse plus les distinguer, puis elles se répartissaient équitablement dans les pores de chaque être vivant.» On enregistre sur l’île un nombre de maladies respiratoires, de cancers et de troubles sanguins cinq à huit fois plus élevés que dans les régions environnantes. Pour ce premier roman «écologique», l’écrivain a pris pour décor la décharge de Guiyu, située sur la mer de Chine en face de Taïwan, tout près d’où il est né en 1981. La ville a été le plus grand centre de recyclage de déchets électroniques au monde.
Un parc de recyclage
C’est une industrie florissante, comme la pollution qu’elle génère. Trois clans insulaires se partagent le gâteau, Lo, Lim et Dang, exploitants sans états d’âme d’ouvriers exposés à tous les risques. «Il n’y a plus d’espoir sur cette île. L’air, l’eau, le sol, les gens, tout baigne dans les déchets depuis trop lo