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Libération
Epistolaire

Marguerite Yourcenar, «L’Œuvre» à l’œuvre

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Publication de la correspondance de la romancière tenue entre 1968 et 1970. Des années charnières pour Yourcenar qui orchestre avec exigence la sortie en France de son livre sur l’alchimiste de la Renaissance Zénon, depuis sa résidence dans le Maine.
Marguerite Yourcenar, chez elle dans le Maine, aux Etats-Unis, en mars 1979. (Sophie Bassouls/Bridgeman Images)
publié le 24 novembre 2023 à 15h38

C’est une maison en bois peinte en blanc, à quelques mètres de la route longeant l’océan, une maison «très simple, avec un grand jardin et beaucoup de livres» telle que la décrivait sa propriétaire, Marguerite Yourcenar. «Les soirs d’été, cinq bougies brillent sur la vérandah.» A l’intérieur, de petites pièces, une cuisine rustique, un salon attenant, un bureau avec deux tables collées face à face. Dehors, un «modeste verger», des fleurs sauvages, des oiseaux chanteurs. Le climat est doux du printemps à l’automne – les hivers sont plus rigoureux, les températures atteignant jusqu’à moins 40°C. Elle est située sur l’île des Monts-Déserts, dans l’Etat du Maine, à douze heures de train de New York. Le village s’appelle Northeast Harbor et le cottage, baptisé par Yourcenar elle-même d’un nom français, Petite Plaisance.

Marguerite Yourcenar (1903-1987) et sa compagne, l’Américaine Grace Frick, avaient acheté cette maison en septembre 1950. Début 1968, elles y habitaient depuis une vingtaine d’années, avaient le même âge (65 ans) et avec elles une épagneule, Valentine. La vie était réglée à leur convenance : petit-déjeuner tardif (vers 10 heures) à l’extérieur «si le temps le permet», pas de «lunch» («inexistant à Petite Plaisance»), l’après-midi le thé («un rituel partout où je suis»), le soir dîner frugal au coin du feu. Les dimanches sont réservés aux visites d’amis. Grace, la plus grande des deux, est perçue comme une originale par les