Par où commencer ? Peut-être par quelque chose de violent, d’éclatant, une ouverture in medias res, quasi abstraite et très sonore. Voyez : «Si le film avait été fait, la première scène aurait pu être celle-là : la voiture qui fait des tonneaux, qui percute l’arbre, qui prend feu.» Un accident de la route, terrible, précédé de la mention «inspiré d’une histoire vraie» – comme le sont parfois les films.
Ou peut-être, non, attaquer par une scène de colère, flamboyante, à la Almodóvar. A l’écran, il y aurait une femme en train de jeter dans l’âtre «tous les messages qu’elle t’a écrits au fil des mois», comme si elle mettait «le feu à son amour». On la reconnaîtrait – elle a vraiment existé –, elle ressemblerait à la peintre américaine Joan Mitchell, 50 ans alors, hors d’elle d’être quittée.
«Par petites touches ou par grands gestes»
La narratrice hésite comme la monteuse à sa table, ne tranche pas, saute une ligne, passe à autre chose, essaye différemment, et avance comme cela, par fragments autonomes ou presque, «par petites touches ou par grands gestes», sans être jamais sûre de la bonne entrée. Alors elle remet l’ouvrage sur le métier. Page 204, autre option : «C’est l’histoire d’une femme qui est en train de mourir.» Depuis son lit d’hôpital, celle-ci regarde par la fenêtre et voit défiler son passé, Mitchell, Riopelle, l’accident