Nous autres humains n’avons pas idée de la hiérarchie sociale qui règne chez les sapins d’élevage. Ils sont là, alignés, plantés à intervalles réguliers en bord de la nationale, à se jauger l’un l’autre, chacun animé par l’espoir d’être mieux foutu que le voisin. Plus grand, plus droit, plus désirable. Suffisamment régulier pour être choisi par Ikea pour se réincarner en armoire ou en tabouret. Un tronc trop de traviole ou trop chétif et la sentence tombe : le sapin finira en allumettes ou en cercueil.
Sapi, lui, se moque de ces considérations comme de sa première aiguille. Animé, il faut l’admettre, par un certain mépris de classe, il compte bien céder sa place au sein d’une gamme de meubles bon marché pour un destin plus rutilant. Le jeune conifère n’a qu’un rêve et compte bien le réaliser : devenir un sapin de Noël. Dès lors, une seule solution s’offre à lui : s’évader de la sapinière et rejoindre la ville. Avec l’espoir d’être adopté par une famille, qui le parera des plus belles guirlandes et en fera le centre de l’attention lors des festivités.
Sapi le sapin est une histoire mignonne, celle d’un arbre porté par ses rêves, un brin naïf mais attachant. C’est aussi une fenêtre ouverte sur la réflexion, l’occasion d’un échange sur l’origine des sapins de Noël, du bois, le bien-fondé du recours à un arbre coupé dans un salon surchauffé, la furtivité des fêtes. Rien de moralisateur, rien de plombant, vous irez sur ce terrain si l’envie vous prend ou le contournerez sans