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Mercredi pages jeunes

«Merveilleux caca» : un livre de merde pour bien démarrer l’année

Cet album cartonné explique avec une grande habileté origine et destinée des excréments, louant leur intérêt pour la biodiversité.

Planche extraite du livre de Mathis, «Merveilleux caca». (Ed. La doux)
Publié le 09/09/2025 à 10h18

A quoi ça tient, finalement, une stature de star ? Du talent, éventuellement, mais surtout beaucoup d’admiration béate de la part d’un troupeau de fans qui vous place au-dessus du rang de mortel, ne concevant pas un instant que leur idole s’abaisse à de vulgaires actes du quotidien. Dans Merveilleux caca, le père Noël dégringole de son piédestal. Figurez-vous qu’il fait caca. Les chanteuses font caca, les reines et les rois font caca, même les maîtresses font caca ! Leurs étrons sont d’ailleurs ici agrémentés de stylos plantés bien à la verticale, car après tout ce sont des colombins de maîtresses. Bref, tout le monde fait caca. Dans la couche, le pot ou les toilettes du train, et même dans la nature si le cœur nous en dit, mais en ce cas il faut bien songer à enterrer sa production et à ne pas laisser le papier chatouiller les sous-bois.

Les livres pour enfants sur le caca, on connaît. Objectif continence et lutte contre l’occlusion intestinale. Celui-ci est rafraîchissant. On se permettra même une entorse déontologique en reprenant les éléments de langage de la maison d’édition : il est «excrément bien». Fort informatif, d’abord. Les jeunes lecteurs découvriront ce qu’est le caca, comment se passe la digestion (expliquée mille fois dans mille bouquins, mais ici de façon claire et plaisante), ce qu’on a trop ou pas assez mangé selon la forme des selles (idem). Globalement, si vous vous éloignez de la «saucisse parfaite», c’est que vous n’avez pas bu assez d’eau ni ingéré suffisamment de fibres. Toutes les nuances allant du «raisin mou» à la «saucisse qui colle à la cuvette» indiquent un trop-plein de gras.

On monte d’un cran dans les connaissances en suivant le chemin d’une crotte depuis les toilettes jusqu’aux champs qu’elle viendra fertiliser, en découvrant au passage le fonctionnement des égouts et des usines de traitement des eaux. Les animaux et leur rapport aux excréments ont une place de choix. Le «champion du monde du caca» (aurez-vous reconnu l’éléphant ?) bénéficie même d’une page, décrivant la façon dont ses colossales déjections sont utilisées pour fabriquer bière, papier et autres briques dans certains pays d’Asie. Wombat, termites, lapins et bousiers ne sont pas en reste, qui ont chacun leur petite particularité crottesque.

Sur la forme, les illustrations en rondeurs de ce grand livre cartonné sont amusantes sans être grotesques ou potaches, servant le propos dans un bel équilibre entre information et divertissement (bravo aux trois cacas blancs qui étaient en réalité des petites meringues déguisées, on s’est fait avoir). Merveilleux caca réhabilite la crotte en mettant en lumière son utilité pour les écosystèmes, dans une approche pédagogique sans prise de tête. Foncez.

Mathis, Merveilleux caca. Editions La doux, 20 pp., 14,95 €. A partir de 3 ans.