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Roman

«Mon amie de plume» de Yiyun Li : l’enfant prodige et son double

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Un duo amical dans la France rurale de l’après-guerre par la romancière américaine née en Chine.

Agnès prétend n’avoir aucune imagination, mais elle se reconnaît deux talents : elle a une belle écriture, elle sait écouter. (Gamma Rapho)
ParClaire Devarrieux
Journaliste - Livres
Publié le 19/09/2025 à 13h45

Et si on écrivait un livre ? Tel est le nouveau jeu proposé à la narratrice par sa meilleure amie. Elles ont 13 ans. L’une va à l’école, où elle est bonne élève, l’autre n’y va plus, elle garde les vaches. Vaches, chèvres, lapins font de la figuration dans Mon amie de plume, situé dans un hameau de la France pauvre et arriérée de l’après-guerre (1953), où les gamines ont faim. On y croit sans y croire. Ce faux réalisme rend le roman agréablement déstabilisant, comme si l’autrice se payait un peu notre tête. Yiyun Li, Américaine née en Chine en 1972, écrit par exemple qu’à la ferme, au moment d’improviser un lit, on jette «un peu de paille et des vieilles couvertures dans un coin de la cuisine». Bon, il y a aussi des cochons. C’est dans l’auge des cochons qu’est jeté un nouveau-né dans «les Enfants heureux», le premier livre des deux filles, des histoires d’enfants morts.

La meneuse de jeu est Fabienne. Celle qui racontera des années plus tard leur amitié et ce qui s’ensuivit s’appelle Agnès. Agnès prétend n’avoir aucune imagination, mais elle se reconnaît deux talents : elle a une belle écriture, elle sait écouter. Est-elle, dans leur duo, la coquille vide don