A l’occasion du Festival du livre de Paris les 12, 13 et 14 avril, nos journalistes cèdent la place à des autrices et auteurs pour un numéro exceptionnel et un supplément de 8 pages spécial Québec. Hervé Le Tellier et Dany Laferrière sont les rédacteurs en chef de cette 17e édition du Libé des écrivains. Retrouvez tous les articles ici.
«Avant, personne ne me posait jamais de question sur mon travail, sur ce que je fais. Ça intéresse personne», commence F., traductrice comme moi. «Mais, l’autre jour, un type de mon village, qui se la joue un peu intello, m’a lancé de but en blanc, quand je l’ai croisé : “Alors, t’es pas trop embêtée avec l’IA ?”» Ça fait tout drôle, c’est sûr : nous, les traducteurs et traductrices, avons plutôt l’habitude de l’ombre. A voir nos noms relégués en petits caractères sur la quatrième de couverture dans le meilleur des cas, parfois à ne pas être mentionnés du tout ; à être payés au lance-pierre, parfois pas du tout. Et soudain, nous voilà au centre (enfin non, n’exagérons rien, disons en périphérie du centre) de l’une des questions philosophico-sociales les plus brûlantes du moment : «l’intelligence artificielle».
Notre statut, notre métier, pose question, et plus seulement à nous qui vivons par essence dans une perpétuelle incertitude : savoir si l’on va avoir assez de travail dans les semaines à venir, savoir si on va pouvoir continuer ce métier. L’ordinaire