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Disparition

Mort de Bernard Pivot : la dictée de l’instituteur cathodique

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De 1985 à 2005, avec ses «Dicos d’or», l’animateur, mort lundi 6 mai à 89 ans, est devenu le hussard noir de la France entière en lui soumettant des textes aussi ardus que l’émission était plébiscitée.
Bernard Pivot dicte un texte dans une salle du lycée Henri-IV à Paris le 17 octobre 1987 pendant les demi-finales du championnat de France d'orthographe. (GEORGES BENDRIHEM/AFP)
publié le 6 mai 2024 à 15h50

On confesse y avoir participé et avoir encore quelque part, prenant la poussière, l’édition 1991 du Petit Larousse qui récompensait notre (pas si piètre) performance. Le collège avait envoyé ce qu’il estimait être ses meilleurs représentants dans un amphi de l’université du coin. Ce n’était que la demi-finale, on s’est arrêté là, un dictionnaire sous le bras, vaincu, dans notre souvenir, par des «chausse-trappes» récalcitrantes.

C’était ça la dictée de Pivot (en fait, cela s’appelait les Dicos d’or, mais qui s’en souvient sous ce nom?), une mobilisation dans la France entière, dans les clubs, les associations, les établissements scolaires, jusqu’à une finale où l’animateur jouait (plus qu’il ne le dictait) un texte caricaturalement impossible parsemé de tournures vieille France et de mots inconnus. La dernière étape donc, retransmise depuis les ors du grand amphi de la Sorbonne, l’hémicycle de l’Assemblée nationale (c’était en 1993, les députés avaient été invités à participer) ou même le Stade de France, était diffusée en direct dans toute la francophonie et même au-delà (1), réunissant des dizaines de milliers candidats officiels (quelques centaines seulement se disputaient le titre dans l’amphi), et des millions d’officieux, stylo en main un samedi à 13 heures, à l’heure du poulet rôti (pour le corrigé, rendez-vous après le journal de 20 heures).

Rendre ludique ce qui était pour beaucoup une torture

L’idée n’était pourtant pas de lui. Elle avait été soufflée par un linguiste bruxellois à une des collaboratrices de Pivot