La disparition de Jean-Claude Fasquelle, samedi, à 90 ans, marque la fin d’une époque, celle où l’édition était une fête. Personne n’était plus discret que ce grand bonhomme muet : sa femme, Nicky Fasquelle, parlait et riait pour deux. Il lui aura survécu à peine un an. Elle est morte le 13 avril 2020 des suites du Covid qu’ils avaient contracté. Mais Jean-Claude Fasquelle était le grand seigneur qui fit de Grasset une maison vivante, généreuse et accueillante, fidèle aux auteurs. On serait bien en peine de définir une ligne idéologique dans son catalogue : il était l’éditeur de Bernard-Henri Lévy, des nouveaux philosophes et de Virginie Despentes, de Brigitte Bardot comme celui d’Umberto Eco. Fasquelle soutint financièrement Eco lorsque celui-ci créa une maison d’édition, la Nave di Teseo, en 2015. A ce moment-là, il avait depuis quinze ans laissé les rênes de Grasset à Olivier Nora.
Premières armes avec «Libelles»
De sa longue carrière, commencée à 23 ans dans l’entreprise familiale créée par son grand-père, les éditions Fasquelle, on trouve la trace dans quelques journaux intimes. Par exemple, le 14 mai 1965, l’éditeur Edmond Buchet raconte l’enterrement de Roger Vailland. Il y a là Gallimard au complet, à commencer par Claude et Simone Gallimard (parents d’Antoine). Jean-Claude Fasquelle est présent, parce qu’il perd son meilleur ami. Ils se sont rencontrés quand le jeune éditeur a fait ses premières armes avec l’élégante collection «Libelles», curieusement sous-titrée : «”Socrate se gratta la cuisse