L’un des plus grands romans de la littérature américaine au XXe siècle est, peut-être, la Femme de John. Un livre dont la plupart des lecteurs, américains ou français, n’ont probablement jamais entendu parler – il est paru en 1996 aux Etats-Unis, puis en 2001 en France au Seuil, dans une traduction de Bernard Hoepffner. Un des sommets de ce qu’on nommait à une époque, sans que l’appellation ne jette d’aucune manière l’opprobre sur les auteurs ni les ouvrages, le postmodernisme américain, contant sur des centaines de pages et à partir d’une minuscule histoire de couple, les cent millions de tribulations d’une petite ville américaine sans nom, en un maelström ininterrompu de récits et sous-récits emmêlés, se dévorant et se régurgitant lui-même, gorgé de mythes et de culture, s’emballant au gré des pages comme un moteur littéraire hors de contrôle, capable d’étirer et faire muter une histoire d’adultère jusqu’à y faire intervenir un kaijû, ces monstres gigantesques japonais dont le plus célèbre se nomme Godzilla. Un livre peu lu mais d’une comparable envergure, en taille et en ton, à celle d’Ulysse, et qui n’était même pas le plus célèbre de son auteur, Robert Coover.
L’Américain, né en 1932 et dont on vient d’apprendre la disparition à l’âge de 92 ans, quelques mois après la parution française de