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Philosophie

Nietzsche en Pléiade, à la hauteur du temps présent

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Le troisième et dernier volume de la réédition par la Pléiade de l’intégralité des textes du philosophe allemand, qui comprend une nouvelle traduction d’«Ainsi parlait Zarathoustra», fait écho aux problématiques contemporaines.
Portrait de Nietzsche, en 1882. (Getty Images)
par Patrice Maniglier
publié le 25 octobre 2023 à 17h19

Imaginez que vous êtes en plein milieu d’un épisode migraineux d’une extrême violence, avec vomissements et évanouissements, cloué au lit des jours durant, sans aucune médecine pour vous calmer. Que feriez-vous ? Vous vous diriez sans doute qu’il faut endurer ce nouvel épisode avec patience, que dans quelques jours sans doute vous irez mieux. Au pire, si vous vous savez condamné, vous songerez peut-être à la mort comme à une délivrance. Nietzsche, lui, réagit autrement : il invente la doctrine de l’éternel retour. Ça passera peut-être, mais ça reviendra à l’identique une infinité de fois, dans son moindre détail, sans même la distraction d’une petite variante dans la douleur. Vous êtes prisonnier de cet instant qui n’a pas besoin de perdurer pour être éternel. Alors la question se pose : si vous étiez pleinement convaincu de cette condition, la supporteriez-vous ? Ou hurleriez-vous de panique en repoussant avec horreur cette existence maudite ? Telle est l’épreuve avec laquelle Nietzsche pensait se mettre et nous mettre à l’épreuve. Avec elle, on saurait qui est capable de ce grand «oui» à la vie telle qu’elle est, à la vie non jugée, qu’il considérait comme le véritable défi existentiel de l’avenir, privé des consolations de la religion et de la morale.

Cette pensée est au cœur du troisième et dernier volume des