Annis – son vrai nom, secret, est Arese : «celle qui vient au bon moment» - est une jeune fille qui écoute aux portes. Sa mère est inquiète. Le maître pourrait se mettre en colère. Cet homme sans pitié est le géniteur d’Annis conçue lors d’un viol. On est en Caroline étasunienne vraisemblablement au XIXe siècle, et Annis, sa mère Sasha, de même que tous les autres noirs, domestiques ou ouvriers agricoles, sont répertoriés -comme les animaux, les outils, le mobilier- sur la liste des biens de ce blanc propriétaire qui vit dans une «maison tarabiscotée couleur crème». Pas loin il y a les rizières, grosses mangeuses de main-d’œuvre gratuite et affamée, et ensuite la forêt.
Qu’écoute Annis, quand son travail harassant de domestique lui laisse un peu de répit ? Elle tend l’oreille pour saisir ce que dit, dans la salle de classe, le tuteur de ses deux demi-sœurs, roses enfants nées du bon côté. Leur précepteur leur parle d’Aristote et les abeilles, et aussi : il «raconte l’histoire d’un homme, un Italien d’autrefois, qui descend en enfer. L’enfer qu’il traverse a des étages comme la maison de mon maître. Le tuteur dit : “C’est par ces mots «Et maintenant, descendons dans ce monde ténébreux», que commence le poète” et ces mots résonnent en moi. J’entends les soupirs : le vent d’été qui pousse la maison, les grognements du bois, mais à la place du poète italien, je vois ma mère trimer dans l’enfer qu’est cette maison.»
Guerrière d’un roi du Dahomey
Le début du livre est encore relativement dou