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Pages jeunes : «Dans le cœur gros d’Anouk», antidote à la grossophobie en culottes courtes

Les pages jeunesdossier
Chaque semaine, «Libération» passe en revue l’actualité du livre jeunesse. Aujourd’hui, l’histoire d’Anouk, dont le gros ventre lui vaut les moqueries d’un camarade de classe.
L'album de Mathou permet d'éduquer des bataillons de marmots à l’acceptation de l’autre. (Robert Laffont)
publié le 8 mars 2023 à 12h50

Anouk a un gros chien, une grosse baignoire, une grosse écharpe. Son gros chien, elle plonge la tête dedans et ça lui fait un bien fou. Sa grosse baignoire, elle la remplit de mousse et ça lui donne l’impression de voler. Sa grosse écharpe, ses copains adorent s’enrouler dedans et avoir bien chaud. Le truc, c’est que Anouk a aussi des grosses fesses et un gros ventre. Et ça, Jules lui a dit que c’était moche. Ça a beaucoup fait pleurer Anouk. Pourquoi quand on parle d’un chien, d’une baignoire ou d’une écharpe, c’est super quand c’est gros ? Et pourquoi le même mot peut nous fendre le cœur quand il désigne le corps ?

Dans le cœur gros d’Anouk, petit album de Mathou dessiné tout en rondeur, aborde les différences et l’intolérance à ce qui dépasse d’un moule sociétal irréaliste. Ces moqueries qui naissent très tôt dans l’enfance et peuvent faire des ravages sur le long terme. Pourquoi diable ce jeune Jules se sent-il le droit de balancer à une camarade qu’elle est grosse et que c’est moche ? Sans doute parce que la société dans laquelle il grandit le lui a appris, sans doute parce que ses parents, ses frères et sœurs n’en pensent pas moins, sans doute parce que personne ne lui a expliqué que faire du mal aux autres ne le rendrait pas meilleur.

Heureusement, autre chose est gros chez Anouk : son cœur. Elle le doit sûrement à ses parents, oreilles attentives capables de trouver les mots justes lorsqu’elle rentre en pleurs de l’école, qui lui assurent que les corps, c’est comme les chiens : ils sont tous beaux, même quand ils sont gros. Il n’y a qu’à regarder ses copains de classe : pas deux ne se ressemblent, et aucun ne vaut plus qu’un autre. Max est certes le plus petit, Léa certes la plus musclée, mais tous deux méritent d’être aimés pareil.

Cet album a une double vertu : rassurer des enfants victimes de remarques blessantes sur leur physique et, surtout, éduquer des bataillons de marmots à l’acceptation de l’autre. Avec l’espoir qu’un jour, «t’es grosse !» ne soit plus prononcé dans les cours d’école.

Dans le cœur gros d’Anouk de Mathou, Robert Laffont, 40 pp., 14,90 €. A partir de 4 ans.