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«C’était une contrée où vivaient des hommes et des livres», disait le poète Paul Celan de Czernowitz, aujourd’hui ukrainienne et connue sous le nom de Tchernivtsi. En 1920, il y naît dans une famille juive germanophone. Peuplée presque pour moitié d’habitants juifs, la ville est alors roumaine, après avoir été austro-hongroise. La poésie de Paul Celan exilé à Paris après la mort de ses parents en déportation est enracinée là, dans cette cité longtemps qualifiée de «Petite Vienne», et dans le souvenir de sa mère assassinée qui lui transmis son amour de la langue allemande.
Fugue de mort est son poème le plus connu. Paru en 1947 dans une revue roumaine il est «déjà la réponse à l’affirmation trop fameuse d’Adorno selon laquelle il ne serait plus possible d’écrire de la poésie après Auschwitz», indique dans sa préface à Poèmes (Corti) le traducteur et auteur d’essais critiques John E. Jackson. Ce large choix de textes en édition bilingue puise dans les recueils de 1952 à 1970, année du suicide du poète par noyade dans la Seine. Pavot et mémoire, la Rose de personne, Tournant du souffle... la poésie de Paul Celan, cryptée, heurtée, existentielle se veut une réappropriation de la langue des bourreaux. On est ici devant «l’une des œuvres majeures de l’après-guerre en