Perpignan, printemps 1943. L’avocat parisien René Bondoux se présente à l’adresse où il doit retrouver d’autres «candidats à l’évasion», prêts comme lui à rejoindre l’Afrique du Nord en passant par l’Espagne. Trouver une filière a été compliqué. Il a d’abord espéré gagner Londres. Il s’y est mal pris. Cet honnête homme que «l’étrange défaite» a révolté veut reprendre le combat. «Ne connaissant rien d’autre, il s’est imaginé rejoindre les Forces françaises libres au détour d’un cocktail.» Finalement, le voilà dans un vieil immeuble qui annonce la couleur : «L’antichambre de la liberté est un bordel.» On lui indique un escalier, un officier allemand arrive en sens inverse, s’arrête. Une prostituée appelle en surjouant l’impatience, l’Allemand dit qu’il arrive. Bondoux a eu chaud.
Quelques jours plus tard, moins de chance. Après avoir erré dans la montagne – le Parisien en costume pied-de-poule et chaussures de ville – les Français sont cueillis par un gendarme espagnol. Détour par la case prison (Figueras, Gérone) pour celui qui a déjà connu l’oflag en Silésie. L’avocat fait jouer ses relations, gagne Casablanca, le voilà proche de Jean de Lattre de Tassigny. Débarquement en Provence, campagne de France, le capitaine Bondoux devient chef de cabinet du général. A Montpellier, on fait défiler les femmes tondues. «Du dégueulasse à souhait. René a honte, et nous avec lui. […] René repense à sa protectrice de Perpignan. Il se dit qu’il en viendrait pour elle