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Pierre-Mong Lim: «J’ai puisé dans la créolité pour rendre l’étrangeté à l’intérieur de la langue»

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Le cahier Livres de Libédossier
Entretien avec le traducteur de «la Traversée des sangliers» du romancier Zhang Guixing.
Des soldats japonais défilent sur l'île malaise de Labuan, au large de Bornéo, le 14 janvier 1942. (Australian War Memorial)
publié le 4 février 2022 à 17h42

Traducteur de la Traversée des sangliers du romancier Zhang Guixing, Pierre-Mong Lim met en perspective dans la préface l’apport de l’auteur à «la littérature chinoise du dehors». Il y parle aussi de la réinvention de la langue au cours du XXe siècle, de Taïwan, terre d’asile de la littérature sinophone de Malaisie, avec des auteurs engagés dans «l’élaboration d’un espace littéraire dont le fondement même est la privation de sol».

Vous dites vous être tourné vers le créole des Caraïbes pour vous aider à traduire ce roman. Pouvez-vous expliciter ce déplacement ?

Zhang Guixing emploie beaucoup de termes dialectaux du chinois de Malaisie qui n’est pas du tout celui qu’on peut trouver sur le continent et même à Taïwan et donc il fallait trouver quelque chose qui rende un peu cette étrangeté à l’intérieur de la langue et pour plein de raisons il me semblait que chez les auteurs de la créolité, de Aimé Césaire à Raphaël Confiant ou Patrick Chamoiseau, il y avait une tentative de travail de la langue française qui pouvait m’aider à retrouver le ton et ce que fait Zhang Guixing avec le chinois. C’est un auteur à la langue très précieuse, très recherchée au niveau des termes et du vocabulaire. Il fait partie de ces gens des communautés diasporiques qui conservent une pureté linguistique presque plus grande que dans le pays d’origine. Or Césaire est quelqu’un qui avait une maîtrise incroyable de la langue, une richesse de vocabulaire énorme et qui en même temps sava