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Libération
Critique

Pourquoi se voiler la face ?

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L’ancienne grande reporter Chantal de Rudder étudie dans un livre-enquête le voilement et son instrumentalisation à travers le monde et les époques.
Zahra Elham, pop star afghane, le 9 octobre 2020. (Andrew Quilty)
publié le 11 mars 2021 à 5h46

Le port du voile et toutes ses extensions vestimentaires – ici et ailleurs – ont été diversement interprétés ; tour à tour, ou tout à la fois, signes religieux, moral, politique, identitaire, voire effets de mode… Quoi qu’il en soit, comme le souligne le titre de ce livre choc, le voilement ne concerne pas que les femmes, avec ou sans leur consentement, mais, à travers elles, le monde. Remonter à l’origine de cette pratique ne peut suffire à sa compréhension. Pour en décrypter son présent, il fallait, en sus d’un solide savoir historique, connaître les divers terrains et posséder des réseaux, quitte à les réactiver. Disposant de tous ces atouts, l’ancienne grande reporter Chantal de Rudder a enquêté, du Moyen Orient aux Etats-Unis, en passant par l’Europe. Partout s’impose le constat d’une instrumentalisation du voilement, servie par une interprétation du Coran, modifiable au gré des finalités politiques. A l’exemple de l’Iran, premier pays à avoir en 1979 rendu le tchador obligatoire, lui accordant ainsi une modernité révolutionnaire. Au-delà des contraintes d’une législation répressive qui invisibilise et anonymise les femmes, la journaliste cherche à saisir les motivations personnelles de celles-ci. Ces précieux témoignages exposent la variété des postures des voilées : rejet, acceptation, franche ou alambiquée, contradictions entre les mots et les actes. Cette complexité reflète le chemin tortueux, finement analysé par l’autrice, qui a conduit à la sacralisation, à géomé