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Critique

«Race et histoire dans les sociétés occidentales», le racisme à la racine

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Retraçant l’origine du terme racisme dans un essai imposant, Jean-Frédéric Schaub et Silvia Sebastiani analysent comment se sont construites les hiérarchies entre groupes sociaux à l’époque moderne.
Un homme espagnol et une femme métisse, au XVIIIe siècle, dans l’une de ces peintures dites de «castes», qui décrivent les métissages entre Amérindiens, ­colons européens et esclaves africains. (Aurimages/Aurimages)
publié le 24 novembre 2021 à 17h42

Cet ouvrage imposant par son érudition n’est pas une simple histoire de la race et du racisme à l’époque moderne. Il s’agit pour Jean-Frédéric Schaub et Silvia Sebastiani de comprendre comment l’Europe occidentale et ses empires ont construit des différences entre groupes sociaux qui reposent sur un fondement considéré comme naturel, en l’occurrence les catégories raciales. Il y a donc bien une politique de la race, observent-ils, dont l’un des signes est que le terme de «race» appartient au langage de l’époque, à la différence de «racisme» qui n’apparaît que dans les années 1900.

Le recours à la race est ancien puisqu’elle fonde la distinction nobiliaire et son principe de l’hérédité. La question du «bon sang» ou du «sang bleu» est au cœur d’une différence pensée comme relevant de la nature. Cette élection par le sang n’est pas métaphorique dans des sociétés qui «ont exercé et subi des violences inouïes pour défendre la croyance dans la transsubstantiation du vin et du pain en sang et chair du Christ». C’est elle qui explique le fait que l’adoption d’enfants, massivement pratiquée dans la société romaine, soit tombée en quasi-désuétude à partir du Moyen Age, au moins dans les catégories supérieures. Cette fermeture a cependant des limites car la noblesse peine à se reproduire, la faute en particulier aux guerres dans lesquelles elle joue les premiers rôles. Si un renouvelle