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Libération

Robert Perisic, drôle de zèbre à Zagreb

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Le cahier Livres de Libédossier
Un cousin farfelu envoyé à Bagdad pendant la guerre porte la poisse au narrateur du romancier croate.
Forces militaires américaines à Tikrit, en Irak, en 2003. (Nikola Solic/Reuters)
publié le 25 juin 2022 à 18h12

Tin, journaliste zagrébois, est un ghost-rewriter philanthropique. Alors que l’invasion américaine de Bagdad se prépare – on est en 2003 –, il a recommandé, poussé par son insistante tante Milka, son cousin à sa rédaction en chef. Boris est un vétéran de la guerre en Croatie (1991-1995), il est au chômage, n’a pas très bonne réputation mais il présente l’intérêt de parler arabe. En rejeton d’une lignée de montagnards des Balkans, Tin a le sens de la famille : Le cousin devrait faire l’affaire en Irak. Mais quand la copie arrive sur sa boîte mail, catastrophe, elle est impubliable pour un hebdomadaire national digne de ce nom. Alors Tin, réécrit tout en cachette, raccommode, fait des ajouts.

Le lecteur de Robert Perisic n’a droit qu’aux nombreux envois bruts du cousin. Ils sont incrustés dans le roman dans une typographie particulière et font entendre les échos du conflit qui se déroule loin de Zagreb. Si la prose ubuesque du cousin Boris ne respecte pas les règles élémentaires du journalisme (qui, quand, quoi, où, comment), elle trouve parfaitement sa place dans une fiction. Et on sent que le romancier, également journaliste comme son antihéros Tin, s’est plu à écrire sur un sujet international hors des canons. Exemple : «Saddam est un jeune paysan de la région de Bassora, ses parents l’ont appelé comme le président, qu’est-ce qu’il y peut, il écarte les bras, il écarte les bras, il écarte les bras, comme un épouvantail, et je les écarte aussi, je les écarte aussi,