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Semezdin Mehmedinovic : «J’écrivais parfois en toute hâte, de peur d’être tué avant d’avoir pu finir»

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Rencontre avec l’auteur bosnien qui signe un recueil de poèmes en prose sur la guerre et le siège de Sarajevo, pour témoigner contre l’oubli et l’effacement.
A Sarajevo pendant le siège, en juillet 1992. (Tom Stoddart/Getty Images)
publié le 5 avril 2024 à 13h52

Il fallait tenir. Il a tenu, en aidant les autres et en écrivant, conditions de la survie. Semezdin Mehmedinovic a 32 ans quand la guerre fait irruption à Sarajevo qui va très vite être assiégé en avril 1992. Il décide de rester avec sa compagne et son fils de 10 ans. Ecrivain, il est l’un des fondateurs de l’hebdo bosnien Dani, notamment aux côtés des auteurs Miljenko Jergovic ou Aleksandar Hemon. Il s’improvise secouriste et saisit des scènes de vie et des vignettes de guerre dans la capitale frappée par les nationalistes serbes. Recueil de poèmes en prose, Sarajevo Blues est un ouvrage polyphonique d’instantanés qui a valeur de témoignage contre l’oubli, comme le raconte l’auteur, de passage à Paris avec sa traductrice, Chloé Billon.

Sarajevo Blues est immergé dans le présent de la guerre qui fait irruption. Vouliez-vous tenir un journal de bord ?

Je suis un écrivain du présent, un observateur. J’ai écrit sur le début de la guerre en Bosnie. Une époque terrible. J’étais poussé par la peur de mourir à chaque instant. J’écrivais parfois en toute hâte, de peur d’être tué avant d’avoir pu finir.

Vous écriviez donc avec cette présence permanente de la mort, tout en étant secouriste au volant d’une Golf ?

Sarajevo a été frappé et assiégé en très peu de temps. La vie était menacée partout. On ne pouvait plus marcher dans les rues principales où la majorité des immeubles étaient exposés aux tirs des snipers. Les jeunes comme moi se concentrai