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Histoire

Sous Louis XIV, un surprenant âge d’or des célibataires

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L’historienne Juliette Eyméoud montre dans quelle mesure la vie hors mariage était encouragée par les familles nobles au XVIIe siècle.
Une «Vue de la maison de Saint-Cyr» au XVIIe siècle. (Bridgeman Images. AFP)
publié le 5 juin 2025 à 6h26

Longtemps, les représentations négatives des célibataires – hommes débauchés, femmes contrefaites, pareillement «symboles de la dénatalité, de l’antipatriotisme, et de l’égoïsme», dominèrent l’imaginaire collectif. Construites au XVIIIe siècle, consolidées ensuite, celles-ci imposèrent dans la société le mariage comme la norme, la seule respectable. Un rien paresseuse, l’historiographie n’a pas douté de la pertinence de cette règle durant toute l’époque moderne. Le titre de cet ouvrage, issu d’une thèse très documentée, la contredit : il fut un temps où la noblesse non seulement ne dévalorisa pas le célibat – cet «état d’une personne qui n’est point marié» (1692) – mais le favorisa, d’où son «incontestable présence».

L’historienne Juliette Eyméoud étudie quatre familles inconnues du grand public, soit 6540 sujets, pour lesquelles elle dispose de riches sources généalogiques, notariales et de documents du for privé, spécifiques à cette couche sociale. Elle y repère souvent des «mentions laconiques mais bien là», concernant chevaliers et filles majeures, et autres individus en défaut d’alliance, désignés à partir de 1762 par le néologisme «célibataire». Ce travail de fourmi dévoile le rôle du célibat, dans les «stratégies patriarcales et patrimoniales» d’alors, et constate que ces «logiques d’héritage et de transmission» sont genrées, tant dans le célibat «programmé» par les familles, que dans celui de circonstance. Le célibat religieux