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Libération
Récit

Stéphane Breitwieser, un voleur à l’œuvre

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Michael Finkel dresse un portrait enquêté du cambrioleur qui invoquait l’amour de l’art pour justifier le vol de près de 200 tableaux et sculptures dans des musées.
«Diane chasseresse» à la Cité de l’architecture et du patrimoine, à Paris, en 1991. (Michel Semeniako/Signatures)
publié le 4 septembre 2024 à 22h10

Lorsque le gardien de la Maison Rubens, en Belgique, quitte sa chaise pour aller déjeuner, Stéphane Breitwieser s’avance vers une statuette «haute de 25 centimètres». Le couteau suisse est au fond de la poche de son manteau, il s’apprête à enlever les deux vis de la vitrine en plexiglas quand Anne-Catherine Kleinklaus toussote. Sa compagne, habillée en Chanel et Dior, surveille «tantôt debout, tantôt assise sur un banc ; elle affiche toujours une sorte d’indifférence détachée tout en s’assurant d’avoir une vue dégagée sur le couloir». Personne ne le remarque placer entre sa chemise et son pantalon la sculpture de Georg Petel, Adam et Eve. C’est seulement après avoir rejoint sa chambre au dernier étage d’une «maison modeste […] en banlieue de Mulhouse» qu’il prend plaisir à l’observer. Il tend la main vers sa table de chevet pour caresser «les ondulations des cheveux d’Eve, les écailles du serpent, les nœuds de l’arbre» ; l’ivoire lui glace les doigts. Il cherche la chaleur dans les tons ocre des tableaux volés de Cranach, Van Mieris… accrochés aux murs. Il n’y a plus un espace vierge, tout est recouvert de «portraits, paysages, marines, natures mortes, allégories, scènes rurales, pastorales» datant essentiellement de la Renaissance tardive.

«Minuscules irrégularités»