Autant le sous-titre est précieux, Fragments d’un portrait de Stéphane Lissner, faisant un clin d’œil à Roland Barthes alors que ni le contenu ni la forme du livre ne justifient cet écho ; autant le texte n’y va pas par quatre chemins. Directeur de l’Opéra de Paris entre 2014 et 2021, Stéphane Lissner remarque notamment : «A l’opéra on n’avance pas. On recule. Le monde avance mais rien ne change à l’opéra. On reste figés dans l’époque où les livrets ont été écrits. Le public de l’opéra aujourd’hui est le plus conservateur qui soit.» Et aussi : «Au théâtre on aime ou on n’aime pas mais on ne hurle pas. Un acteur a un trou de mémoire, le public applaudit quand il reprend. Le théâtre ne génère pas d’hystérie, le théâtre est un cadeau.»
Et l’Opéra, un fardeau ? Les griefs ne s’arrêtent pas là : les places sont trop chères et seules 80 œuvres valent la peine d’être jouées, ce qui limite le répertoire. Mais l’homme, né en 1953, n’est pas bougon à chaque page, et ses souvenirs permettent de mesurer le prestige d’un directeur d’opéra et la nature de son travail. Il consiste à franchir des obstacles, transmettre son enthousiasme à des artistes ou polir le leur. Les meilleurs passages relatent l’expérience