Depuis 2019 et un premier récit, le Monde horizontal, on connaît la manière de Bruno Remaury : il fabrique une maquette de notre monde puis y promène des personnages réels, et d’autres un peu moins, mais qui auraient pu l’être. Il leur fait observer ou vivre des situations, des échanges humains, leur fournit un peu de lecture pour comprendre (ou se méprendre sur) ce qui les environne.
Ce monde où ils évoluent est une sorte de modernité étale, depuis 1500 jusqu’à nos jours, où dates et lieux se court-circuitent et se superposent dans un jeu d’échos fascinant. Le résultat n’est ni tout à fait de l’essai ni tout à fait de la fiction. Plutôt, comme le dit l’auteur, des «chroniques». Plongés dans l’Histoire, ses personnages interrogent leur propre regard – ou pas.
Golfeuse raciste de San Francisco
Par exemple Eileen Farthington, décédée en 1996 à l’âge de 69 ans, dont Remaury retrace la vie (fictive) : cette golfeuse raciste de San Francisco «rêve qu’un ordre ancien va revenir, que les rues seront propres à nouveau, que tous ces gens, quelle qu’en soit la couleur, disparaîtront de sa vue et qu’ils rentreront chez eux, où, ça elle ne sait pas, mais chez eux quoi». Avant de disparaître elle-même. Notons que «Voilà, c’est terminé» ou «Voilà, c’était fini» sont parmi les conclusions favorites de l’auteur. Mais ce n’est pas tout à fait fini, puisqu’en 1996, la comp