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«Tambora» de Hélène Laurain : magma maternel

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Des grossesses aujourd’hui et un volcan meurtrier au XIXe siècle, le deuxième livre de l’autrice navigue entre les genres.

Le volcan Tambora, en Indonésie. (EyeEm Mobile GmbH/Getty Images)
Publié le 03/10/2025 à 12h49

Après Partout le feu (Verdier, 2022), toujours le feu. Le deuxième livre d’Hélène Laurain porte le nom d’un volcan indonésien, le Tambora, qui, en 1815, entra en éruption et tua «environ dix mille personnes de ses conséquences directes» – et autour de dix fois plus de ses conséquences indirectes (tempêtes, tsunamis, victimes de la faim…), ce qui en fait «probablement l’éruption la plus meurtrière de tous les temps». Les répercussions sur le climat furent telles que 1816 devint l’«année sans été» : un nuage de poussière bloqua le soleil et fit chuter durablement les températures. Le nom «Tambora» résonne en tambour et il faut l’entendre en synonyme de la fin des temps. Nous voilà au bord du gouffre et c’est un texte qui commence au présent : «Je regarde mes filles, amples comme des villes.»

On ne comprend pas tout de suite pourquoi Tambora s’intitule Tambora. Il faut attendre d’avoir dépassé la moitié pour qu’il soit question de la catastrophe. Comme par contraste, c’est un texte qu’on dirait aqueux, plein de fluides, de rondeur, où la secousse vient d’abord d’une fausse couche. «La Mort est une médecin platine» et cette dernière a une statistique : «Les fausses couches c’est une femme sur trois haussement d’épaules. C’est trop tard pour un cachet, l’embryon est trop grand. Dans deux jours on va opérer.» En allemand, on dit Fehlgeburt ; en anglais, miscarriage. Les mots bien sûr importent et très souvent en