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Mémoires

«Tous immortels», à double tranchant

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Dans ses mémoires, Paul Pavlowitch, petit-cousin de Romain Gary, revient sur sa relation tumultueuse avec l’écrivain qui lui a fait incarner son pseudonyme Emile Ajar.
Paul Pavlowitch, lors de son passage dans l'émission «Apostrophes» en 1981. (Bridgeman Images)
publié le 16 février 2023 à 6h16

Il est rare, exceptionnel, voire inédit, qu’un personnage de roman soit aussi – et en même temps – une personne de chair et de sang. C’est pourtant ce qui s’est passé dans l’affaire Emile Ajar /Paul Pavlowitch. Il s’est agi d’une machine infernale, d’un double jeu autour du «je» qui a commencé en comédie et s’est terminé en tragédie par le suicide du démiurge (Romain Gary). La mascarade littéraire avait été éventée à la mort de Gary en 1980. Mais on apprend en lisant ce livre qu’au cours des quarante années qui ont suivi, et jusqu’à aujourd’hui, ce jeu pervers a envahi, phagocyté, obéré la vie de Paul Pavlowitch, cousin de Gary, son homme de paille et de plume. Au terme de sa vie, celui-ci prend la parole une dernière fois dans un ouvrage épais, qui est, pour une part, un assemblage de souvenirs de ceux qu’il a aimés et qui ont disparu ; pour l’autre un règlement de compte posthume vis-à-vis de son machiavélique cousin.

Dès l’avant-propos Pavlowitch annonce la couleur : «Après les aventures d’Emile Ajar, plus de quarante années se sont écoulées durant lesquelles j’ai dû vivre. Avec le temps, on aurait pu penser se calmer, être tiré d’affaire. Pas du tout. C’est que depuis j’ai dérouillé. Et je pérore nettement moins.» Et ajoute : «La mort est ma voisine.»

Jeu de miroirs

Rappelons la réalité du stratagème inventé par Gary : il avait chargé Paul Pavlowitch d’i