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Critique

«Tout ouïe» d’Alexandre Postel : les murs du son

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Dans une maison d’édition en déclin, un manuscrit se présente. Son héros est un homme à l’obsession monstrueuse : écouter de toutes les manières possibles la jouissance des femmes.

«Ne subsiste plus qu’un écho si lointain qu’on croit l’avoir rêvé.» (Emmanuel Pierrot /VU)
Publié le 05/09/2025 à 13h11

La satire exige un désir de jouer avec les formes et de tendre au lecteur un miroir qui déforme, qui le gêne. Elle suppose une part de mauvais esprit, une volonté de rire de sa misère et de celle des autres, de tuer l’emphase par le comique et les certitudes par l’ambiguïté. Elle traite le sérieux par l’absence de sérieux. C’est pourquoi, sans doute, elle n’est plus à la mode. Tout ouïe, cinquième roman d’Alexandre Postel, n’est donc pas un roman à la mode, mais c’est une satire réussie. Il n’est pas publié chez Gallimard, éditeur des précédents livres de l’auteur, mais aux éditions de l’Observatoire.

«Je n’ai jamais rencontré un seul auteur qui s’étonne d’être publié», constate Violette Letendre, éditrice expérimentée aux éditions Monteverdi, lesquelles sont en déclin. Elle édite des écrivains qu’elle surnomme «le Carlin» ou «Miss Vetiver». Son collègue Bastien Testevuide vient d’être nommé directeur littéraire : «Sa gestuelle, sa mimique incarnaient avec un peu trop d’application l’homme touché d’une faveur insolente, écrit Violette. Il savait très bien que ce poste aurait dû me revenir.» Il répète volontiers une phrase du fondateur de la maison : «Les nouvelles, c’est comme les épinards. Tout le monde en vante les qualités, mais personne n’en achète.» Le fait d’avoir été formée par «la belle Dorothée» n’est sans doute pas étranger à la disgrâce de Violette : «Ainsi surnommait-on la défunte éditrice dont le flair et