C’est un petit livre qui tient dans la poche et laisse sa marque. Un livre rouge, court, simple dans son expression, direct, carré, comme s’il fallait maintenant mettre de l’ordre et faire les comptes. Treize années à te regarder mourir dit où, quand, comment, combien, et commence par une naissance : «André est né à La Châtre dans l’Indre, en plein cœur du Berry. Le Berry c’est loin. Loin de tout. La grande ville, la mer, la montagne, tout est loin.» André est né au milieu des années 60, «en 1964, le 12 octobre», dans une famille ouvrière où l’alcoolisme se transmet de génération en génération. «Un alcoolisme qui n’est pas le fruit d’une tradition ou d’une culture mais qui est déjà le témoin à l’époque d’un renoncement à l’avenir de toute une catégorie de population abandonnée, laissée à elle-même.» Cet alcoolisme l’a tué, comme son père avant lui. Le narrateur parle ici de son père à lui et s’en distance peut-être en partie en l’appelant par son prénom. «Qui aurait dit que tu finirais comme ça, André ?»
Il y a les faits, les jalons, les dates, les chiffres («Tu es apprécié autour de toi et pourtant, aux alentours de 32 ans, tu sombres»), les circonstances qui conduisent à, le contexte, les détails, et il y a l’atmosphère. Après le divorce, André s’installe dans un appartement «sordide» à Châteauroux. Il en sort peu, principalement pour aller au PMU et se ravitailler en canettes pour avoir ses «sept litres de bière» quot