Le capitaine Celestino est un féroce pirate rangé des voilures. Après une vie bien remplie, le voilà de retour dans son village natal du Portugal. Le noir Boa Morte a combattu du côté du colonisateur, dans la guerre d’Angola. Aujourd’hui, déchu, il traîne dans les rues de Lisbonne et garde des voitures contre quelques euros. Le dernier héros de ces Trois Histoires d’oubli est un vieux valet, noir également. Il est esclave et s’appelle Brume. Le nom lui va bien, tant il vit dans une réalité parallèle. Ces hommes qui ont l’essentiel de leur existence derrière eux abordent une dernière période où ils semblent se dissoudre, devenir spectres, avant que la mort, qui est patiente, ne les saisisse. Et l’attrait de ce livre est là, dans l’atmosphère cotonneuse, d’abandon qui y règne.
Premier ouvrage traduit de Djaimilia Pereira de Almeida, autrice portugaise née en Angola en 1982, ce triptyque s’inscrit dans le sillage des Trois Contes de Flaubert. Mais ses personnages, hormis Brume peut-être, sont loin de la candeur de l’inoubliable bonne au perroquet, Félicité. Celestino est le moins fréquentable. Les adultes se détournent de lui au village, mais les enfants qui aiment les récits d’aventures recherchent sa compagnie. L’ancien pirate à l’œil unique, qui maintenant se consacre à l’art de faire pousser les fleurs, sait les divertir. «Approchez-vous, les enfants, venez auprès de moi qui ai tranché des gorges et dors du sommeil du juste. Vous voulez savoir qui j’ai tué ?