A la lecture du dernier roman de l’Espagnole Sara Mesa, Un amour – livre glaçant, trompeur, malaisant (dans le genre de l’autrice, ce sont des compliments) –, on pense certes à d’autres lectures (Joyce Carol Oates, Laura Kasischke, J. M. Coetzee), mais aussi à ce jeu de stratégie qui s’appelle les Loups-Garous». Peut-être y avez-vous déjà joué : disposés en cercle, les participants représentent un village dans lequel rôdent de dangereuses créatures. Certains joueurs sont «villageois», d’autres «loups-garous». Des profils supplémentaires compliquent l’affaire : «la petite fille», «la sorcière», «la voyante»… Chaque nuit, une nouvelle victime est éliminée. C’est à qui saura le mieux observer les signes (œillades, postures…) afin de désigner du doigt la menace et, tour après tour, réussir à sauver sa peau ou à dévorer les autres.
Dans la «commune rurale abandonnée à son triste sort» où la citadine Natalia vient de s’installer, la bien nommée Escapa, chacun ou presque a un surnom : il y a «l’Allemand», pour ce voisin taiseux dont la mère était dit-on allemande ; «le hippie» pour Piter, cet autre habitant aux cheveux longs, un vitrier lui-même opaque ; «la sorcière» pour la vieille Roberta qui perd la tête… Dans la maison d’à côté, une petite fille crie et, la nuit, «les chiens, toujours les chiens, rivalis[e]nt d’aboiements.» Comme dans le jeu, tous paraissent avoir un rôle qu’il va falloir deviner. «Dans les villages, l’usage d