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Roman

«Un monde plus sale que moi» : Capucine Delattre, dans les yeux d’Elsa

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Le cahier Livres de Libédossier
La romancière raconte des débuts amoureux à l’époque de #MeToo.
Capucine Delattre dévoile dans son deuxième roman les zones grises du consentement. (Clara Chichin/Hans Lucas)
publié le 23 septembre 2023 à 5h43

Elsa a 17 ans et un premier amour, au beau milieu de la soudaine clameur de celles qui ont déjà connu les abus, les viols. «Je suis une fille de mon époque. J’ai découvert l’amour en même temps que #MeToo.» Mais elle veut croire au cocon de son histoire. «Il me semblait que si Victor me garantissait un certain degré d’affection, je serais protégée des porcs.» Prise dans les phares de sa petite histoire perso et de celles, innombrables, qui défilent sur les réseaux, Elsa expérimente une espèce de sidération. «Certaines générations ont engendré des révolutions, la nôtre a livré des témoignages. […] Leurs récits, maculés de violence, de vulgarité, sont des films en langue étrangère dont les images me frappent, mais dont le sens m’échappe. […] Elles me parlent comme à travers une vitre.»

Et la légion des témoignages finit par brouiller la perception qu’elle en a, jusqu’à épuiser son empathie. «Je me suis habituée. C’est alors que je comprends pourquoi les hommes ont inventé les filles. Nous sommes des machines à accepter. A défaut de vouloir que les choses se passent, nous les rendons possibles.» Bien sûr, la jeune femme vit ses propres expériences, une prise de conscience aiguisée par l’époque. «#MeToo me force à exister comme femme partout où je vais. […] J’ai honte d’être matée parce que depuis Twitter, je n’ai plus le choix de