Parce que l’histoire est racontée du point de vue de la fille, et non celui de la mère, il y a dans le nouveau roman d’Aimee Bender une scène pivot qui tient en cinq lignes : un jour, après le petit-déjeuner et une fois son enfant partie pour l’école, Elaine s’est fracassé la main avec un marteau. Atteinte de troubles psychotiques, elle était persuadée qu’une bestiole s’était faufilée sous sa peau et elle voulait l’écraser. «Comme on écrase une araignée.»Tout ou presque ayant ici un sens à double fond, on pense à ce que c’est que d’avoir «une araignée au plafond», à comment d’un coup l’expression française prend vie et descend de ses hauteurs de folie douce pour se muer en une menace rampante à écrabouiller. Les limites de la réflexion sont soulevées par Tante Minn, femme elle-même terre à terre, après un échange avec le psychiatre de sa sœur : «Mais qui écrase une araignée avec un marteau ?» Oui, c’est en somme la question, et la réponse c’est: Elaine, «ma mère». Araignée du matin, chagrin. Et si les chiens ne font pas des chats, alors quoi d’autre ? Francie, 8 ans au moment des faits et narratrice, a de son côté d’autres insectes à l’esprit. Devenue grande, elle travaille dans un magasin d’encadrement – ce qui ne veut pas rien dire non plus – mais quitte ce job pour sa passion : dénicher des objets dans des vide-greniers afin de leur offrir une seconde jeunesse (et de les revendre sur Internet). Son propre appartement est fonctionnel, dépouillé. Le tem
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«Un papillon, un scarabée, une rose»: roman à antennes d’Aimee Bender
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Aimee Bender, en 2008, en Californie. (Max S. Gerber)
par Thomas Stélandre
publié le 5 février 2021 à 21h16
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