Un jour de juin 2020, elle a refait surface. Elle s’est manifestée alors qu’il n’y pensait presque plus et, surtout, là où il ne l’attendait pas : sur la langue, une plaie vive et douloureuse «grosse comme une pièce de deux euros». Et sur le visage des vésicules saignantes parcourues de «mille feux». Rare, l’affection auto-immune ne guérit pas tout de suite. Elle diffuse la douleur, infuse le souvenir. «La violence de la maladie m’a rappelé la violence de la guerre», raconte Velibor Colic lors d’un passage à Paris du plus balkanique des écrivains établis à Bruxelles. Avec Guerre et pluie, il signe un récit troublant, dur et lucide, traversé par la nostalgie, parfois l’ironie, sur des mois en absurdie et dans la furie du début du conflit en Bosnie en 1992. Avant le sauvetage et la «grande fierté d’avoir déserté».
Avant de s’y replonger, il est à Bruxelles, en soin. Il comprend que la «guerre éclate par sa bouche, sur sa peau. […] La maladie est une addition des ombres», écrit Colic, ajoutant que le conflit «revient toujours, pire qu’avant. C’est comme la fumée du passé empoisonnant mon présent». Il a trop longtemps accumulé, attendu, cru que la littérature et l’écriture l’aideraient à oublier. Trente ans après la déflagration yougoslave, l’écrivain est rattrapé par le chaos et frappé au cœur : la lang