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Libération
Deux en un

Margarethe von Trotta, couples d’éclats

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Le nouveau long métrage de la cinéaste allemande, «Ingeborg Bachmann», sort en compagnie de «l’Amie» (1983). Deux beaux films sur l’intimité des femmes, leurs relations amoureuses ou amicales.
Vicky Krieps, actrice-sphinx, incarne l’autrice autrichienne Ingeborg Bachmann. (Splendor Films)
publié le 6 mai 2025 à 18h26

A l’occasion de la sortie d’Ingeborg Bachmann de Margarethe von Trotta, cinéaste incontournable issue du nouveau cinéma allemand des années 70 (et seule femme derrière la caméra du groupe), la société Splendor Films ressort, couplé, l’Amie (1983). Quarante ans les séparent. La permanence chez Trotta est celle des femmes donc des actrices qu’elle étudie : là Angela Winkler et Hanna Schygulla liées par une amitié inédite car sans envie ni rivalité féminine, qui débute par un coup de foudre et finit par un coup de feu ; ici Vicky Krieps en Ingeborg Bachmann, immense écrivaine autrichienne de l’après-guerre et de la pensée de l’après-guerre – très proche de Paul Celan avec qui elle entretint une correspondance essentielle –, de la possibilité ou non de la poésie après les camps.

Krieps, l’actrice-sphinx, ici dans son élément de sable, fan de Lawrence d’Arabie, semble entrer à son tour «en amitié» avec la figure de Bachmann, comme Barbara Sukowa dans les précédents films, mais elle procède comme à chaque fois sans le moindre mimétisme : Krieps ne fait même pas l’effort de se coller une frange à la Bachmann. Elle préfère, à la ressemblance cosmétique, une évocation et un état : le tourment, l’étourdissement. Elle flageole, se tient au bord du malaise, de l’effondrement, comme d’un précipice. Krieps use de ses cernes comme seul maquillage, et de ce trait qu’elle exagère elle fait le centre du caractère, de sa fatigue morale, de son trouble y compris visuel, comm