Des coups réguliers, lourds, comme de grands chocs de poutrelles d’acier, retentissent par la fenêtre ouverte d’un appartement berlinois modeste. Dans cette chambre, un jeune homme avachi sur son lit est tourmenté par des questions d’amour et de néant tandis que le volume de son tourne-disque poussé au max plonge ses parents dans une profonde tristesse. Ce satané boucan qu’ils ne comprendront jamais, c’est Pas attendre du groupe berlinois Sprung aus den Wolken («saut depuis les nuages»), morceau choisi fort à propos par Wim Wenders pour habiller cette scène de fracture générationnelle qu’entraperçoit l’ange Damiel lors de sa descente sur Terre, au début des Ailes du désir (1987). Le morceau, culte dans le Berlin alternatif du début des années 80, doit sans aucun doute au film de Wenders sa survie à travers le temps, et bénéficie aujourd’hui d’une belle réédition par le label hambourgeois Bureau B, en même temps que tout le premier EP du groupe sorti en 1981.
Deux ans après la réédition de leur premier album, Bureau B met un beau coup de chiffon sur des enregistrements intrinsèquement cracra – opération délicate puisqu’il s’agit d’épousseter et masteriser sans attaquer la saleté constitutive du geste à l’arrache, pensé comme une attaque contre le bon goût et la technicité.
Unies par une façon de faire
Dès le premier hurlement de guitare électrique, on est rassuré : tout est toujours aussi bancal chez Sprung aus den Wolken, organe formé en 1980 autour de l’artiste Kiddy Citny qui se fit partic