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Rencontre avec Alain Chamfort : l’adieu vivant

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Le chanteur caméléon sort «l’Impermanence», sublime nouvel album annoncé comme le dernier. L’occasion de revenir sur soixante ans de carrière, de Cloclo à Gainsbourg, de crooner new wave à «sans label fixe».
Chamfort avance façon Beau Brummell insubmersible, jouant – jouissant presque – de ces fins qui approchent comme on s’extrait avec délice d’un cirque devenu trop vain. Paris, le 5 Mars 2024. Portrait d'Alain Chamfort. (Boby/Libération)
publié le 28 mars 2024 à 17h41

Alain Chamfort et Jennifer Lopez ont un point commun. Tous deux ont annoncé que leur nouvel album serait également le dernier. On n’est pas allé vérifier pour J.Lo, mais le seizième et ultime Chamfort fait assurément office de sortie royale, dans un palais discographique riche en belles dorures, pavillons exposés et chambres secrètes, moins visité que jadis mais toujours admiré par les persistants qui s’y aventurent. L’Impermanence, avec son beau titre d’inspiration bouddhiste (en gros, rien ne dure, il faut s’y résoudre avec sagesse), est embaumé dans une brassée d’anémones, de lys et d’œillets presque fanés, sans le visage ni la silhouette de celui qui, on l’a compris, s’efface.

Cette solennité, pourtant, appuyée par un orchestre à cordes au diapason, est un faux-semblant. Chamfort n’est pas Leonard Cohen, au chant marmoréen de son vivant, ni même Françoise Hardy, qui chante sa subclaquance depuis trois siècles. Plutôt un Randy Newman (cité d’ailleurs à la volée) pratiquant l’ironie pincée et l’oxymore rieur, comme sur l’introductif l’Apocalypse heureuse : «Doux est le calvaire, vieillir est une blessure sévère, mais profond est le bleu d’Anvers, de nos