Ne serait-ce que pour Kara Toprak, un hook latin disco mutant avec synthés planants et voix évanescente, ce disque vaut le détour. Ce titre résume la démarche synthétique d’un passé à réinvestir : Kara Toprak est une pièce de choix du répertoire du barde aveugle Asik Veysel, virtuose du baglama et médiateur de la tradition ashik, au cœur de l’Anatolie. Il en existe de nombreuses versions, dont une par Tarkan et une plus récente par Islandman, toutes deux pleines de mélancolie. Cette fois, Kara Toprak («terre noire», un titre aux préoccupations écologiques avant l’heure) est donc le sujet d’une relecture tout autre par les hipsters d’Altin Gün.
Repérée grâce au label Bongo Joe, cette bande fédérée autour du bassiste néerlandais Jasper Verhulst qui eut la révélation en découvrant la Joan Baez du Bosphore Selda Bagcan s’est donné pour mission depuis cinq ans de donner leur version post-2000 des grandes heures psychédéliques de la Turquie des années 70. Leur premier disque en portait sans doute le fardeau, un héritage trop lourd pour leurs frêles épaules quand on sait ce qui put sortir d’Istanbul dans cette décennie dorée (les terribles Mogols et tous ceux qui suivirent Murat Ses, Baris Manço, Mustafa Özkent, Erkin Koray…). Le second Gece, un brin plus folkeux, peinait encore à convaincre, ne parvenant pas à tout à fait se départir de ses influences tutélaires.
Taillé au cordeau
Si elles sont encore bel et bien présentes dans ce troisième album, néanmoin