Une voix tonne sous la rotonde. Enfin, après de longues minutes d’attente dans la pénombre, seulement sonorisées des bruits grinçants qui tonnent dans les haut-parleurs disposés en cercle autour de la scène : un mantra. «The shadows, they speak» (les ombres nous parlent). La scène est vide pourtant, Arca, c’est elle, est introuvable. Une pulsation sourde, à peu près métronomique, accompagne un fantôme – «Entendez-vous le battement de mon cœur ? Il accélère en pensant à vous.» Puis on la distingue à travers une ouverture dans le cylindre de la Bourse de commerce, à Paris, dans une coursive à l’étage. En robe de soirée, fendant une foule qui se mue en file pour la suivre, smartphone à la main. Elle descend, rejoint la scène, la voix trouve son corps et la première pensée claire se forme : elle va trop vite pour nous. Chanceux d’avoir déniché des billets pour le concert de ce vendredi soir – un autre aura lieu le lendemain samedi, puis une fête select, avec Björk et Arca elle-même aux platines dans le sous-sol de la Fondation Pinault, sous le regard de 13 «anges» peints sur toiles lacérées que l’artiste expose pour la première fois –, le petit auditoire devait s’en douter : le temps que le regard se dessille, Arca est déjà partie.
Ça fait douze ans que ça dure. Qu’Alejandra Ghersi file, et que nous la traquons, essoufflés, étourdis, sur ses talons. Douze ans que la Vénézuélienne, femme trans en mutation permanente, tient la dragée haute à tout ce que la galaxie éle