Certes, techniquement avec six morceaux et vingt minutes de musique, Argent n’est pas un album, plutôt un EP, mais la productivité de ce duo transcontinental n’est pas suffisamment massive pour qu’on boude son plaisir. De toute manière aujourd’hui, le vocabulaire de la musique a changé, un morceau est un «son» et un disque un «projet», alors un «album» c’est un truc de «daron».
Bref, depuis leur rencontre à Paris en 2016, la chanteuse congolaise Faty Sy Savanet et le percussionniste Nicolas «Dakou» Dacunha n’ont enregistré qu’une poignée de «sons», mais à chaque fois remarquables et remarqués.
Depuis Telema en 2019 et les concerts explosifs qui l’ont accompagné, Tshegue n’a plus donné de nouvelles. Producteur et musicien de studio réputé, Dakou semblait accaparé par son autre «projet», The YD, au son pop soul plus traditionnel, tandis que Faty apparaissait dans la troupe du Vol du Boli, l’opéra de Damon Albarn et Abderrahmane Sissako.
Leur retour, inattendu, n’en est que plus jouissif. Six «sons» seulement, mais d’une impressionnante puissance. D’ailleurs, dès l’été et la sortie de Sing my Song, première secousse annonciatrice de la déflagration à venir, on savait qu’une grenade avait été dégoupillée. Du kuduro à l’amapiano, le continent africain est aujourd’hui, avec sa diaspora, une terre fertile pour la musique. En voici une nouvelle démonstration. Associant le style afropunk à guitare de leur première production à une vision technoïde du dancefloor global, Tshegue reprend le dossier là où le groupe lusophone Buraka Som Sistema l’a laissé, réussissant encore à accélérer la cadence. Tout explose et coupe le souffle. On est en sueur rien qu’en écoutant ce disque frénétique dont l’énergie vitale donne le tournis. On en sort en n’espérant plus qu’une chose, que Tshegue n’attende pas cinq ans de plus pour enregistrer, cette fois, un véritable LP.
Tshegue Argent (Animal63)
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