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Libération
On y croit

Brigitte Fontaine, rockeuse de diamant

Pour son nouvel album, la plus frondeuse des Françaises s’est associée à la transe electro des Limiñanas. Un accord vivifiant.
« Pick Up », le nouvel album de Brigitte Fontaine, conçu avec Lionel et Marie Limiñana. (Frank Loriou / Agence VU)
publié le 15 novembre 2024 à 23h00

Brigitte Fontaine est Brigitte Fontaine. Depuis 85 ans. Une artiste certainement inclassable, mais dont les multiples tentacules ont ramené dans leurs filets, au fil de cette carrière au long cours, de très estimables compagnons de route, chargés d’honorer sa prose insolente et rebelle. Pour les plus remarquables, ils se nomment Areski Belkacem, Jacques Higelin, l’Art Ensemble of Chicago, Jean-Claude Vannier, Etienne Daho, ou Alain Bashung. Une femme de goût qui dans la dernière ligne droite de sa vie adoube le duo garagiste perpignanais, Lionel et Marie Limiñana, venus frapper à sa porte, pour imaginer un successeur à l’éclaté, mais un peu trop brouillon, Terre neuve (2020). Toujours avide d’expériences (on se souvient encore de leur excitante collaboration avec Laurent Garnier sur De Pelicula), The Limiñanas rameute son gang de potes dont Pascal Comelade aux claviers, pour échafauder un fameux écrin à la plus grande rockeuse française et cet album en est la nouvelle preuve.

Loin de certains diesels de la jeune chanson française aux décollages incertains, Brigitte l’éternelle révoltée, délivre un uppercut d’entrée sur le court Neuf Trois, pamphlet pour territoire oublié, agité par les violences policières. Ce début de Pick Up est d’ailleurs sidérant puisque à l’ode à la banlieue rouge et noire, succède Mariage (1), sarabande rageuse tournant en boucle entre electro-clash vicieuse et garage-punk virulent, puis arrive le bouleversant Cantilène où, sur une mélodie mi Cosma, mi Morricone, elle clame, émouvante, «je veux vivre, j’ai trois ans, j’ai plus de vingt mille ans». Et on peut compter sur cet exceptionnel backing-band pour ne jamais faire baisser la tension d’un album subtilement nerveux. Il faut dire que l’alliance est parfaite entre cette nouvelle transe électrique et l’éternelle verve délirante et exaltée. Mais qui d’autre que Brigitte Fontaine, pourrait chanter sans être ridicule : «les bulles de savons sortant du cul des belles, ce sont des blancs moutons ou des chevreaux qui bêlent, j’aime les animaux bien plus que les humains» ? Unique, on l’a dit.

Brigitte Fontaine Pick Up (Verycords)

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