Moses, le titre
Auréolé du succès monumental de sa BO pour le film Shaft, Isaac Hayes est le plus gros vendeur de Stax, et de son succès commercial dépend la survie du label. Il a tellement d’influence sur la communauté afro-américaine que Dino Woodard, le responsable de la promotion de Stax, le surnomme Black Moses, le Moïse noir. Au début réticent, Hayes hurle au blasphème. Lui qui est si religieux finit par s’y faire, conscient de son impact sur sa communauté. Pour lui, il s’agit d’abord de fierté, de fierté noire : les hommes noirs peuvent enfin s’affirmer comme tels, car ils ont désormais pour eux la figure de Black Moses, épitomé de la masculinité noire. Le nom de l’album est tout trouvé.
La pochette
Un brin perfide, Larry Shaw, directeur artistique de Stax, trouve que l’album est si pauvre qu’il faut en premier lieu vendre son emballage. Il décide de dépenser sans compter pour créer une pochette comme on n’en a encore jamais vu. Ron Gordon, en charge du design chez Stax, a carte blanche et un budget illimité. Il embauche le photographe spécialisé Joel Brodsky (auteur de 400 pochettes dans sa carrière) et joue à fond la carte du Moïse noir : ils emmènent Hayes sur les bords de l’Hudson à New York et le font poser les bras en croix, vêtu d’une tunique qui lui donne un air mystique. Pour que le public découvre la nouvelle personnalité du musicien, Stax réalise un tour de force : la pochette s’ouvrira sur six volets (au lieu de deux dans le meilleur des cas) pour former une croix de 1,30 m de