Ce sont deux mondes qui se percutent. Le 23 juin, à Sens, dans l’Yonne, Meryem Aboulouafa, 36 ans, prépare déjà sa rentrée, la sortie de Family, son deuxième album, alors prévue le 26 septembre, la pochette, la promotion, la tournée, une première date à Marseille, en attendant une autre à l’Institut du monde arabe en fin d’année. Ce jour-là, un courrier de l’Administration numérique pour les étrangers en France tombe dans sa boîte mail. Simple formalité, songe-t-elle, avant de découvrir tout le contraire : non-renouvellement de son titre de séjour, assorti d’une obligation de quitter le territoire (OQTF), dans un délai de trente jours… Le déni, puis l’incompréhension totale, puis la détresse. Sans attendre, elle dépose un recours. «Vous avez votre maison, vos affaires, votre véhicule, vos engagements professionnels et en trente jours, il va falloir vous organiser pour partir, résume-t-elle. Par où vous commenceriez, vous ?»
«Je suis venue pour des raisons historiques»
Deux mois plus tard, elle nous reçoit dans une petite maison de Colombes, dans les Hauts-de-Seine, où elle continue de préparer le concert de Marseille, toujours prévu le 18 septembre. La sortie de l’album, elle, a été repoussée en décembre. Sweat-shirt gris, sourire tenace et mine quelque peu fatiguée par l’été d’inquiétudes. «Tout est en suspens, assure-t-elle, sans réponse pour la suite.» Elle est tiraillée. Entre l’envie de raconter, le trouble, l’inconfort, le désarroi, l’arbitraire, et une certaine crainte, celle de