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Libération
La grande série de l'été (19/37)

Le jour où... Erykah Badu a popularisé le mot «woke»

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Avec la sortie de son titre «Master Teacher», le 26 février 2008, la diva américaine a fait émerger le mantra «I stay woke», synonyme de prise de conscience des injustices sociales et raciales. Mais le concept, repris par Black Lives Matter, a fini par échapper à l’artiste, notamment à cause de sa mansuétude à l’égard d’agresseurs sexuels et de prêcheurs antisémites.
La chanteuse Erykah Badu, lors du festival de jazz de Montreux, en juillet 2008. (Fabrice Coffrini/AFP)
publié le 6 août 2021 à 20h45

Le 26 février 2008 en Amérique. C’est un mardi. A première vue, rien de très remarquable. La campagne présidentielle bat déjà son plein. Un jeune sénateur noir avec un nom à faire frémir dans les chaumières câblées sur Fox News s’empoigne à distance avec un vétéran du Vietnam au patronyme de frite surgelée sur les cendres fumantes de la décennie bushienne. L’un veut partir d’Irak, l’autre «gagner». Comme le prince Harry, qui, de retour d’Afghanistan, régale les tabloïds anglais de ses exploits en treillis. Le royal rouquin, un temps amateur de costumes nazis, moque «Terry Taliban et ses potes». Personne pour s’en indigner sur Twitter, obscur jouet pour geeks lancé dans l’indifférence moins de deux ans plus tôt. A la télé, NBC cartonne avec The Celebrity Apprentice, où le has been peroxydé Donald Trump, entre deux banqueroutes, joue au patron à poigne pendant que la crise des subprimes vide les pavillons en stuc de leurs banlieusards surendettés. Trayvon Martin et Michael Brown sont au collège. Et à Dallas, Erykah Badu fête son 37e anniversaire.

Concepts fourre-tout américains

Son cadeau se trouve dans les bacs des disquaires. A l’intitulé programmatique, New Amerykah Part One (4th World War), son quatrième album après des années de disette créative, est enfin là. C’est une bombe artisanale sous cellophane. Un magma de funk aussi ésotérique que politique.