Le 26 février 2008 en Amérique. C’est un mardi. A première vue, rien de très remarquable. La campagne présidentielle bat déjà son plein. Un jeune sénateur noir avec un nom à faire frémir dans les chaumières câblées sur Fox News s’empoigne à distance avec un vétéran du Vietnam au patronyme de frite surgelée sur les cendres fumantes de la décennie bushienne. L’un veut partir d’Irak, l’autre «gagner». Comme le prince Harry, qui, de retour d’Afghanistan, régale les tabloïds anglais de ses exploits en treillis. Le royal rouquin, un temps amateur de costumes nazis, moque «Terry Taliban et ses potes». Personne pour s’en indigner sur Twitter, obscur jouet pour geeks lancé dans l’indifférence moins de deux ans plus tôt. A la télé, NBC cartonne avec The Celebrity Apprentice, où le has been peroxydé Donald Trump, entre deux banqueroutes, joue au patron à poigne pendant que la crise des subprimes vide les pavillons en stuc de leurs banlieusards surendettés. Trayvon Martin et Michael Brown sont au collège. Et à Dallas, Erykah Badu fête son 37e anniversaire.
Concepts fourre-tout américains
Son cadeau se trouve dans les bacs des disquaires. A l’intitulé programmatique, New Amerykah Part One (4th World War), son quatrième album après des années de disette créative, est enfin là. C’est une bombe artisanale sous cellophane. Un magma de funk aussi ésotérique que politique.