«Oui mais moi, je vais seule, par les rues, l’âme en peine. Oui mais moi, je vais seule, car personne ne m’aime.» Nous sommes à l’été 1967 quand au cœur des foyers français les téléviseurs diffusent un reportage à propos d’une jeune chanteuse en plein boom de notoriété chez les yé-yés. Cheveux châtains, silhouette longiligne vêtue d’un rien de spleen, elle répond à la question suivante: «Quand vous vous regardez le matin dans la glace, comment vous vous imaginez à l’intérieur de votre tête ?» Dubitative : «Bah quand je me vois dans la glace je vois l’extérieur…» Le journaliste insiste : «Mais l’intérieur, comment vous vous l’imaginez ?» Avec nonchalance, elle lâche : «Oh je n’y pense pas, j’y pense rarement. J’aime autant y penser le moins possible.» Puis soudain, les yeux dans le vague, déjà loin, elle ajoute : «Ça me fait peur… J’ai peur du vide que je risque d’y trouver.»
C’est l’époque des sixties et des jeunes paumés en blue jeans qui s’accrochent aux flancs des flippers pour ne pas voir filer leur jeunesse trop vite. Ils chantent du Cloclo, du Johnny, du Sheila, du Bardot. Du Françoise Hardy. «Pour moi, elle incarne autant la beauté physique que la beauté spirituelle. C’est le symbole de l’amitié. Lorsqu’elle chante ses chansons, […] on dirait qu’elles sortent