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Libération
On y croit

Paranoid London, anars et la manière

Le duo anglais, toujours énervé, a invité des amis sur leur nouvel album, comme Bobby Gillespie ou Jennifer Touch. Bonne idée.
Quinn Whalley et Gerardo Delgado, le duo London Paranoid. (DR)
publié le 3 février 2024 à 4h09

Trous du cul, menteurs et pionniers électroniques. Si le duo londonien Paranoid London n’a pas dépassé le cercle restreint des fanatiques de l’acid house, un œil sur l’underground, l’autre sur la scène chicagoane des années 90, son troisième effort studio, lui, remporte le prix du meilleur titre d’album haut la main. Il faut être un peu dingue, comme les deux compères Gerardo Delgado et Quinn Whalley, pour afficher clairement les bas-fonds de sa pensée à une époque où on s’offusque pour un rien. Mais ces anciens punks se sentent «entourés par une cavalcade de cons», et le seul répit vient pour eux «des génies musicaux», au premier rang desquels ils citent les immortels Wire.

Il ne faudrait pas voir en Paranoid London que deux anars quinquas aigris qui transforment depuis 2014 leur rage en acid house de cave, sombre, brute et moite. Ces farouches indépendants – ils ont leur label et ont longtemps refusé de jouer le jeu de la promotion, se contentant de lapidaires «fuck off» à toute question – sont également des stakhanovistes de la TR909 et de la TB303, Quinn Whalley œuvrant au sein du groupe post-punk Warmduscher, du projet Decius avec Lias Saoudi de The Fat White Family ou dans l’ombre de Josh Caffé. Et si la 303 et la 909 ont dessiné la production passée de Paranoid London, une récente panne de machines, qui a donné lieu à l’équivoque EP Annihilate The World & Start Over, leur a donné une nouvelle impulsion. Plus qu’une collection de tracks râpeux et virulents, Arseholes, Liars and Electronic Pioneers élargit ainsi son champ d’action dès son entame, une ballade psyché cold wave portée par la voix de Bobby Gillespie (Primal Scream). Si la suite, où l’on retrouve aux vocaux les habitués Josh Caffé et Mutado Pintado, nous replonge dans le stupre et les backrooms, les tempos changent et de nouveaux vocalistes apportent une fraîcheur bienvenue : Joe Love, chanteur de Fat Dog, s’ébroue sur une sorte house progressive survitaminée, et Jennifer Touch apporte une touche lumineuse qui manquait. En ouvrant les vannes, le colérique duo offre ici son album le plus accessible. Véner, mais ouverts.

Paranoid London Arseholes, Liars and Electronic Pioneers (Paranoid London Records)

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