Les moteurs de recherche disent très peu de tout ce qu’est Chris Imler. Ils recrachent quelques clips à petit budget, les références d’une discographie solo entamée en 2014, des portraits récents, l’une ou l’autre chronique… Mais rien ne permet de saisir l’envergure d’une carrière musicale qui s’est construite essentiellement sur scène, dans l’ombre, indissociable du terreau fertile de l’underground berlinois, et de l’underground tout court d’ailleurs, puisque ce batteur allemand donne des concerts dans toute l’Europe et au-delà depuis la nuit des temps pré-Internet. «Je peux dire avec beaucoup d’arrogance : je suis demandé, je n’ai jamais demandé» et, au bout du fil, on devine le sourire sous l’odieuse petite moustache à la Little Richard.
Sur The Internet Will Break My Heart, son quatrième album, Chris Imler, 66 ans, regarde le monde et se demande ce qui se passe, écoute «cent mille chansons» en un clic, ne reconnaît pas ces amis virtuels qui essaient de l’embrasser, se soucie de tous les animaux de la «vraie vie» pas assez mignons pour une carrière en ligne… et se balade dans un état semi-halluciné à travers des montagnes de déchets et des trains à grande vitesse qui semblent savoir où ils vont alors que lui, que dalle. Largué ? Réac ? Plutôt une espèce de poésie de l’entre-deux nourrie par les voyages de ce Bavarois relocalisé à Berlin il y a quarante ans et qui marmonne d’un air faussement détaché sur des boucles technoïdes, kraut dans l’âme,