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«With You In Mind», «Sister Morphine», «The Old House»… Marianne Faithfull en cinq titres essentiels

Des années 60 et sa voix de soprano aux années 2010 et ses collaborations magiques en passant par le techno-blues féministe… «Libé» a sélectionné cinq morceaux de la chanteuse britannique, morte jeudi 30 janvier, qui aura marqué la musique.
Marianne Faithfull en concert à l'Alhambra, à Paris, le 9 février 1966. (Jean-Pierre Leloir/GAMMA-RAPHO)
publié le 31 janvier 2025 à 8h32

La chanteuse britannique, passionnée de poésie alliant noblesse et décadence, est morte jeudi 30 janvier à 78 ans. Elle aura marqué la musique, le théâtre et le cinéma. De ses chansons, au-delà de As Tears Go By, écrite par Keith Richards et Mick Jagger, Libé en a retenu cinq.

With You In Mind (1966)

C’est par là qu’on la découvre, c’est par là que son nom imprime avec, évidemment, As Tears Go By, mais c’est aussi là, paradoxalement, qu’on revenait le moins lorsqu’on évoquait ces dernières années Marianne Faithfull. Ces années 60 où elle a encore sa voix de soprano, pur cristal, et ses teintes adolescentes, qui céderont par la suite au timbre rauque et heurté que l’on connaît mieux, et aux chansons plus abîmées. Une période qui, outre le tube précité, regorge de merveilles telles que Come and Stay With Me, Go Away from My World, Counting. Ou ce With You in Mind signé Jackie DeShannon, sublime chanson de rupture, qui avance comme un corbillard dans une vallée de fleurs, pleine de sucre grinçant et de regrets rentrés.

The Ballad of Lucy Jordan (1979)

Perdue, donnée pour morte, après des années d’addiction, durant lesquelles elle s’est retrouvée à la rue et anorexique, Marianne Faithfull revient en novembre 1979 avec Broken English qui s’imposera, sur le long terme, comme son indiscutable chef-d’œuvre. Un disque froid et inquiet, pendant satin-velours du The Idiot d’Iggy Pop, tout en basses déliées et synthés frileux, porté par un morceau-titre impérial et cette reprise du tube country FM de Dr. Hook & The Medicine Show, ballade tragique sur les désillusions d’une femme au foyer qu’elle transforme en techno-blues féministe.

Sister Morphine (1969/1979)

Popularisée par les Rolling Stones, sur Sticky Fingers en 1971 mais coécrite avec Marianne Faithfull dont la version était sortie deux ans plus tôt, discrètement, en face B de son single Something Better. Interprétation aride, vaguement hésitante, que les Stones parviendront sans mal à sublimer. Avant qu’elle ne se la réapproprie en 1979 (de nouveau en douce, planquée en face B, du single Boken English) pour en faire une fascinante supplique décharnée.

I’ll Keep It With Mine (1987)

Autre résurrection, autre sommet. En 1986, enfin sortie d’une addiction à l’héroïne qui aura duré pas loin de deux décennies, Marianne Faithfull enregistre l’ahurissant Strange Weather, douze titres signés par des plumes de première catégorie (Tom Waits, Alan Lomax, Doc Pomus, Jagger/Richards) dont on pourrait citer n’importe quel titre sans se planter, mais où l’on donnera l’avantage à ce I’ll Keep It With Mine écrit et composé par Bob Dylan, rogaton de 1964, récupéré par Nico en 1967 et trouvant sa mue définitive dans ce country blues arachnéen servi enveloppé dans une épaisse couche de fils barbelés concertina.

The Old House (2011)

Duos avec Beck, Damon Albarn ou Jarvis Cocker ; collaborations étroites avec PJ Harvey et Nick Cave ; interprétations de chansons signées Etienne Daho ou Mark Lanegan : dans les années 2000, Marianne Faithfull est toujours aussi inspirée pour choisir ses accointances. Mais c’est lorsqu’elle retrouve ceux qui ont traversé les mêmes tempêtes qu’elle, dans la bascule entre les années 60 et 70, que la magie opère le plus clairement. Comme sur The Old House, chanson parmi ses plus bouleversantes où sa voix, tremblante, vient se briser sur les débordements ferrugineux de la guitare de Lou Reed, qui semble la mettre en pièces puis l’emporter avec elle, vers d’étranges profondeurs.