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Casque t'écoutes?

Yann Marguet : «Le Requiem de Mozart, une vraie merde»

L'humoriste et chroniqueur radio Yann Marguet, en novembre 2022 à Lausanne. (Valentin Flauraud )
publié le 29 juin 2024 à 6h45

Chaque semaine dans l’émission Quotidien sur TMC, l’humoriste franco-suisse Yann Marguet termine sa chronique qui mêle absurde, pathétique et une certaine férocité par une phrase devenue fameuse : «Vivement qu’on crève.» Certes, mais en écoutant de la musique.

Quel est le premier disque que vous avez acheté adolescent avec votre propre argent ?

Club Techno Dance 4. Un genre de Plus Grande Discothèque du monde au rabais. J’ai, qui plus est, découvert après achat que tous les titres étaient interprétés non pas par les artistes officiels, mais par l’Orchestre Gilles Pellegrini et ses chanteurs. J’étais misérable.

Votre moyen préféré pour écouter de la musique, MP3, autoradio, platine CD, vinyle… ?

J’utilise Spotify pour offrir aux artistes une réelle reconnaissance et des conditions salariales respectueuses.

Le dernier disque que vous avez acheté et sous quel format ?

Final Fantasy 7 Rebirth, sur PlayStation 5.

Où préférez-vous écouter de la musique ?

En général sur les trajets à pied. Mon corps a beaucoup besoin de s’exprimer quand j’écoute de la musique donc je privilégie les moments et les endroits où les gens ne font que me croiser et n’ont pas le temps de réaliser qu’un homme de 39 ans est vraiment en train de mimer une guitare avec ses mains et chantonne les tierces en écoutant NOFX.

Est-ce que vous écoutez de la musique en travaillant ?

Impossible. Mon cerveau a une capacité d’attention trop faible pour que je lui impose plus d’infos qu’il n’en reçoit déjà en écrivant.

La chanson que vous avez honte d’écouter avec plaisir ?

Despacito. Elle me donne l’impression de voler.

Le disque que tout le monde aime et que vous détestez ?

Le Requiem de Mozart. Une vraie merde.

Le disque qu’il vous faudra pour survivre sur une île déserte ?

J’avoue que votre utilisation du futur simple dans le libellé de cette question m’inquiète un peu. Vous avez des infos que je n’ai pas ? Si, d’aventure, j’étais amené à devoir survivre sur une île déserte, cela dit, je pense qu’il me faudrait les 36 Chambers du Wu-Tang Clan.

Y a-t-il un label ou une maison de disques à laquelle vous êtes particulièrement attaché et pourquoi ?

J’ai eu ça, du temps où je diggais bien plus qu’aujourd’hui, où il me fallait du Rawkus, du Def Jam, du Death Row, du Ninja Tune. Ou de l’Epitaph, pour le rock. Maintenant, je m’en branle un peu. Je trouve ça même un peu snob de «discuter labels». Donc non.

Quelle pochette de disque avez-vous envie d’encadrer chez vous comme une œuvre d’art ?

Club Techno Dance 4. Et si pas dispo en magasin, alors la cover d’Animals de Pink Floyd. Cette photo m’a toujours fait beaucoup d’effet. L’usine est à la fois sinistre et somptueuse, la lumière est irréelle, il y a du Hopper, du Böcklin, du Orwell, du Stephen King… Ça me fout des frissons.

Un disque que vous aimeriez entendre à vos funérailles ?

Jacques Brel, le Dernier Repas. Certes, certaines paroles ne sont plus vraiment en accord avec la société moderne, mais elle dépeint si bien notre cheminement inéluctable vers la mort. L’arrangement est parfait et rend le texte palpable. Le repas, la joie, l’inquiétude, le souvenir, la peur. Et la colline.

Savez-vous ce que c’est que le drone metal ?

Bien sûr que non.

Préférez-vous les disques ou la musique live ?

J’ai perdu mon appétence pour les concerts avec l’âge. Finalement, sur la dose de live que je me suis collée, j’ai dû voir moins de dix performances vraiment marquantes. Je me suis lassé. Je me souviens de ces concerts à la Manu Dibango où les mecs reviennent sept fois sur scène alors que je prie pour que ça s’arrête. Aujourd’hui, je me sens mieux à vibrer seul dans mon petit monde à mon propre rythme plutôt qu’à celui des cris de la foule.

Votre plus beau souvenir de concert ?

C’est totalement random car je n’aime pas spécialement l’artiste en question, mais je crois que c’était Michael Franti & Spearhead en 2010 sur Governors Island, à New York. C’était la fin d’un séjour estudiantin de six mois et il y avait tout. Le climat, la skyline de Manhattan, le coucher de soleil, l’insouciance, ces amis éphémères qu’on a aimés plus que tout et à qui on dira au revoir dans les jours qui suivent. Plus qu’un souvenir de concert, c’est l’un des plus beaux souvenirs de ma vie.

Allez-vous en club pour danser, draguer, écouter de la musique sur un bon sound system ou n’allez-vous jamais en club ?

Ça m’arrive, mais j’y fume plus des clopes dehors en faisant des blagues que je n’y danse.

Quel est le groupe que vous détestez voir sur scène, mais dont vous adorez les disques et inversement ?

Alt-J fait partie des groupes qui m’ont renforcé dans l’idée qu’un album, souvent, c’est mieux qu’un live. A l’inverse, je me rappelle avoir été totalement captivé par un mec sur scène qui s’appelle Jack Garratt - un de ces mecs qui font des loops tout seuls - et que l’écoute subséquente de son album n’a pas changé ma vie.

Votre film musical préféré ou votre musique de film préférée ?

La La Land. Sans aucune hésitation. Ça pourrait même être mon film préféré, mais je dois réfléchir, je ne peux pas lancer ça à l’emporte-pièce. Je ne sais pas si ça compte, mais je suis aussi très branché comédies musicales et la version scénique de Billy Elliot fait entièrement partie de ma vie.

Quel est le disque que vous partagez avec la personne qui vous accompagne dans la vie ?

Beaucoup, mais récemment, je lui ai fait découvrir The Decline de NOFX, une symphonie punk de 18 minutes et 21 secondes avec des mouvements et énormément de variations. Il existe notamment une version live filmée et enregistrée avec un orchestre (mais pas celui de Gilles Pellegrini) et on s’est retrouvés effondrés, en larmes, à la fin de la vidéo, tant l’ensemble était symbiotique, sincère et harmonieux.

Le morceau qui vous rend fou de rage ?

Ça dépend vachement du type de rage. Si c’est «fou de rage» tellement c’est nul, alors je dirais que certains rappeurs actuels dont le seul message consiste à marmonner les vertus du Xanax et du Percocet me désespèrent un peu. Si c’est pour se mettre «fou de rage» volontairement, alors je dirais plus X Gon’ Give It To Ya, de DMX.

Le dernier disque que vous avez écouté en boucle ?

A ma grande surprise, lors du si personnel et pas du tout algorithmé «récap Spotify» de l’année écoulée, j’ai découvert que le «disque» que j’avais le plus poncé en 2023 était la BO d’un jeu vidéo fabuleux intitulé Disco Elysium.

Le groupe dont vous auriez aimé faire partie ?

Saïan Supa Crew. J’étais ado, mais je crois qu’aucun groupe de musique dans ma vie ne m’a autant donné envie d’être copain avec eux. J’ai serré la main de Sly Johnson, il y a peu. Un simple geste pour lui, une petite fête pour mon cœur.

La chanson ou le morceau de musique qui vous fait toujours pleurer ?

Il y en a trois, si on a le droit, et c’est toujours lié à l’amour ou au temps qui passe. Dis quand reviendras-tu ? de Barbara, Salut les amoureux de Joe Dassin et les Vieux de Brel.

Ses titres fétiches

Wu-Tang Clan Da Mystery of Chessboxin’ (1993)
Koji Kondo The Legend of Zelda (1998)
NOFX The Decline (1999)