Allez-y, plissez les yeux. Concentrez-vous. Vous finirez bien par la trouver. Qui ? Eh bien la femme ! La seule et l’unique, la robe isolée dans ce gigantesque mille-pattes de costards d’hommes, ces membres du Congrès américain de 1918. Dans le livre où se trouve l’image, une petite flèche signale Jeannette Rankin (merci, c’est sympa), première femme élue à la Chambre des représentants, pour l’Etat du Montana (elle était républicaine). La photo a, pour nos yeux de 2022, quelque chose d’hilarant qu’elle n’avait sans doute pas à l’époque – le ridicule de ces hommes pas du tout gênés, pas du tout consternés de s’afficher ainsi dans toute la majesté de leur entre-soi. Le fou rire nerveux que suscite bien souvent le livre, qui tient avant tout au comique involontaire de répétition, est un des paradoxes d’Une seule femme (Phaidon), élégant petit tome très documenté consacré par la cinéaste documentaire américaine Immy Humes à une centaine de femmes qui, entre 1862 et 2020, se sont trouvées, un jour ou l’autre, à figurer sur une photo où elles étaient prises en sandwich par des hommes, parfois énormément d’hommes.
Imagerie type photo de classe
Le trajet que décrit le livre, c’est celui de la très lente intégration des femmes aux structures de pouvoir, qu’il s’agisse d’univers d’artistes, de dentistes, de journalistes, de brigands (!) ou d’hommes d’affaires, lesquels s’accommodaient avec plus ou moins mauvaise grâce de leur présence. Toutes ces exceptions confirment une règle, souligne Immy Humes, celle «<